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LE PETIT BLEU


la carte-télégramme, à droite et à gauche du texte, un certain nombre de fragments (l’un d’eux avec un mot de l’écriture de l’envoyeur, et toute la partie inférieure avec la moitié de l’avis imprimé, du côté de l’adresse), environ 36 centimètres carrés. Le soleil, véridique, ne peut reproduire sur la plaque sombre que ce qui existe. L’épreuve, retouchée, pourra figurer un document net, mais non intact. Si la carte avait été saisie à la poste, Picquart l’eût apparemment décollée à la vapeur, de manière à ne perdre aucun fragment. Aussi bien, Lauth lui-même n’a jamais insinué que Picquart aurait eu l’intention de produire seulement les épreuves corrigées, de supprimer l’original[1], qui seul fait foi en justice[2] ; et comment l’aurait-il pu supprimer ? Tout le bureau le connaissait ; une photographie implique un objet photographié ; comment expliquer la disparition de l’objet[3] ?

XIV

Avant qu’Henry fût revenu des obsèques de sa mère, ni l’authenticité du petit bleu ni son lieu d’ori-

  1. Cela a été prétendu par Junck (Cass., I, 428), et par Roget (Instr. Tavernier, 4 nov.), qui eut Junck sous ses ordres directs, au cabinet de Cavaignac ; mais ni l’un ni l’autre n’expliquent comment Picquart eût pu s’y prendre pour substituer une photographie (grise ou noire) à un petit bleu. — En fait, Picquart communiqua l’original à Boisdeffre et à Gonse. — Le mémoire de Picquart porte l’indication suivante, au paragraphe où il est question du petit bleu : « Voir les pièces n° 1 (original) et a (photographie). »
  2. Procès Zola, I, 297, Picquart.
  3. Ibid., 355 : « M« Clemenceau : Le chef de l’État-Major n’aurait-il pas réclamé l’original ? — Lauth : C’est probable. »


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