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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

Cavaignac, à la tribune, s’était tenu dans le vague. Il n’avait point dit quel était ce document qui eût suffi à calmer l’agitation. Il convint, dans les couloirs, qu’il ne l’avait pas vu, mais il était « moralement sûr[1] » ; il laissa entendre qu’il s’agissait d’un rapport. En fait, il avait parlé seulement sur la foi de Boisdeffre et de Gonse, qui lui avaient dit ce qu’ils voulaient, sans qu’en son austère inconscience il leur en demandât davantage.

Le dossier des aveux ne comprenait encore que deux pièces : la déclaration qui avait été dictée, en octobre, à Lebrun-Renaud, et : une note de Gonse, sur une conversation qu’il avait eue, en décembre, avec Mercier.

Mercier, selon Gonse, « se souvenait parfaitement, sans, toutefois, pouvoir indiquer exactement les termes employés, que les paroles rapportées par le capitaine Lebrun-Renaud, le jour de la dégradation, constituaient des aveux ». Ces paroles lui avaient paru assez importantes pour mériter d’être immédiatement communiquées au Président de la République et au président du Conseil[2].

Comme on l’a vu, Lebrun-Renaud n’avait soufflé mot des prétendus aveux ni à Casimir-Perier, ni à Dupuy, ni à Mercier[3].

Billot ne demandait qu’à être trompé. La date récente de ces pièces expliquait que ni Gonse, ni Boisdeffre n’eussent objecté à Picquart les aveux de Dreyfus.

  1. Une de ses conversations (du 18 janvier 1898) fut rapportée le lendemain dans les Droits de l’homme, C’était le bruit public des couloirs.
  2. Cass., II, 132. La note est datée du 6 décembre 1897. Elle débute ainsi : « Le général Mercier, que j’ai vu ce matin, se souvient parfaitement… etc. » Elle est signée : « le général : A. Gonse. »
  3. V. t. I, 503 et suiv.