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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Belfort, Hartschmidt, Coubertin et Saxcé déplacés, Metzinger invité à se taire, les préfets et les chefs de corps d’armée informés, par deux circulaires, qu’ils répondraient directement, ceux-ci de la discipline et ceux-là de l’ordre. La circulaire de Galliffet tenait en quatre mots : « Silence dans les rangs ! » Ainsi commença « la défense républicaine ».

XIV

Depuis deux ans, on était secoué dans un train déraillé ; d’un coup, la locomotive remontait sur ses rails ; tous, qu’ils fussent amis ou ennemis, éprouvèrent la même sensation : que la machine ne roule plus au hasard et que le mécanicien la tient en mains.

Nulle colère dans ces mesures, nulle rigueur inutile, qui eussent paru de l’affolement ou de la vengeance ; mais l’avertissement était précis.

On oublie si vite l’atmosphère, les circonstances, que ces premiers actes de Waldeck-Rousseau ont paru plus tard médiocres et sans portée. On dira alors que les disgrâces eussent dû être plus sévères et plus étendues, surtout qu’il eût fallu révoquer Carrière, comme la pensée en était venue d’abord à Galliffet. — Il dit au journaliste Barthélémy : « En d’autres temps, je l’eusse privé de son emploi ; j’ai été retenu par la crainte de paraître presser sur les juges[1]. » — Ainsi Dreyfus restait encore hors du droit commun et, parce qu’il n’y avait pas de plus tragique victime, on lui refusait tou-

  1. Journal du 25 juin 1899.