Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/255

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
245
LE RETOUR DE L’ÎLE DU DIABLE


supprimer la détestable officine où les meilleurs n’entraient pas sans y être gâtés par quelque endroit et qui était à l’origine de ces longs troubles, non seulement l’avait conservée, mais la laissa aux mains du personnel qu’il y avait trouvé et qui continuait les mêmes errements et servait les mêmes haines. Le commandant Rollin, l’archiviste Dautriche, les capitaines François, Fritsch et Mareschal étaient aussi enragés contre Dreyfus que s’ils avaient participé à son premier jugement. Galliffet s’étant enquis si toutes les pièces relatives à l’Affaire avaient été envoyées à Rennes, Rollin et Dautriche l’attestèrent, alors qu’ils continuaient à en dissimuler plusieurs des plus importantes, où les avocats de Dreyfus eussent trouvé la preuve d’autres faux d’Henry[1]. Ils n’informèrent ni le ministre ni le général Brault qu’ils connaissaient la retraite de la Bastian, alors qu’ils savaient la police à sa recherche[2] ; mais ils firent raconter par Drumont que le « Syndicat », inquiet de ce qu’elle aurait pu déposer à Rennes, l’avait dénoncée à Munster, que celui-ci l’avait chassée et qu’elle avait quitté Paris, prise de peur[3].

Ils surent aussi de Brücker qu’il s’était rencontré récemment avec Tomps, le commissaire spécial qui

  1. Voir t. IV, p. 476 et suiv.
  2. François raconte (Procès Dautriche, 164) que Galliffet lui parla de la Bastian, « qui avait disparu », et lui dit d’aller chez elle ; il répondit : « Il y a une façon conventionnelle de frapper chez elle ; et puis elle ne me connaît pas ; enfin elle a un revolver à portée de sa main. Il y a quelque chose de plus simple ; nous avons un intermédiaire… » Bref, des prétextes. « J’ai su plus tard que Mme Bastian était allée à Marly ; je n’y étais pour rien. Et la Sûreté ne m’a demandé aucun renseignement. »
  3. Libre Parole du 10 août 1899.