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RENNES


leurs affaires, en Suisse, rentrèrent à Paris, Mareschal d’abord, puis Rollin[1], et ce fut alors qu’ils rencontrèrent (ou que Mareschal seul rencontra) Przyborowski.

Comme Mareschal ni Rollin ne se sont expliqués sur cette entrevue, on la connaît seulement par le récit que le Polonais en a fait quatre ans plus tard au juge Trottabas, délégué par la Cour de cassation pour recevoir sa déposition à Nice[2], et par celui qu’il en aurait fait au couple Wessel, peu après le procès de Rennes. Mais ces deux récits diffèrent.

Selon les Wessel[3], Rollin et Mareschal auraient entretenu d’abord Przyborowski de l’arrestation de Mosetig, son complice viennois. Ils venaient de l’apprendre et en étaient fort troublés. En dehors des officiers du service, il n’y avait, disaient-ils, que le Polonais et Tomps à connaître leur commerce avec lui, et ils ne soupçonnaient pas l’espion, mais le commissaire spécial, de l’avoir dénoncé par une lettre anonyme[4]. Tomps, on le sait, était leur bête noire. Aussi bien n’en était-il pas à sa première trahison ; il avait essayé précédemment de conduire Brücker en Alsace et de l’y faire arrêter, et c’était, en effet, la

  1. Le 18, il s’arrêta à mi-route pour aller dans le Doubs, son pays natal, où il prenait ses congés ; mais il en fut rappelé dès le lendemain. Il passa la journée du 20 à Paris avant d’aller à Rennes. (Procès Dautriche, 230, Rollin.)
  2. Tribunal de Nice, 23 mars 1904.
  3. Déclaration de Wessel au commissaire central de Nice, 4 mai 1900. (Procès Dautriche, 547) ; dép. de Mathilde au tribunal de Nice, 24 mars 1904.
  4. En fait, il avait été arrêté à la suite d’une perquisition chez le lieutenant de réserve Charles Saria, soupçonné d’espionnage. On trouva chez Saria un registre avec des annotations marginales dont l’écriture ressemblait à celle de Mosetig. Saria était innocent ; Mosetig avoua ses relations avec Przyborowski, dont il avait reçu en tout 210 florins, et fut condamné à 18 mois de prison.