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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


jura, par la suite, que Cernuski ne s’y trouvait pas avec eux et qu’il n’avait jamais parlé à Mareschal de ce joueur[1].

Demange fut renseigné dès le lendemain sur Schœnebeck, dont l’aventure n’était pas seulement connue de l’État-Major et de la police, mais encore de Drumont et d’Esterhazy ; la confusion (préméditée) entre les deux Mosetig, le docteur, dont le titre, d’ailleurs banal, de conseiller aulique, imposait, et l’espion, dont la parole eût paru suspecte, fut établie seulement après la fin du procès[2] et apparut aussitôt comme une marque certaine d’État-Major. Le procédé avait déjà servi plus d’une fois, d’abord à Guénée et à Henry, puis à Roget, quand il attribua au beau-père de Dreyfus des propos, d’ailleurs dénaturés, du professeur Hadamard.

Malgré tant d’obscurités, qui étaient alors beaucoup plus épaisses, les revisionnistes n’eurent pas un doute ; on n’entendit qu’un cri : « Le faux témoignage de Cernuski lui a été commandé et payé. » Jouaust l’ayant renvoyé à l’audience publique du lendemain, qui devait être la dernière des débats, le procès va s’achever par la démonstration, une fois de plus, qu’il est impossible d’avoir d’autres preuves contre Dreyfus que des faux.

Cernuski fut-il pris de peur ? Mercier lui fit-il passer un avis ? ou la comédie avait-elle été réglée d’avance ? Quoi qu’il en soit, dans l’après-midi qui suivit la séance à huis clos, il écrivit à Carrière « qu’il était malade, alité, dans l’impossibilité absolue de se rendre

  1. Tribunal de Nice, 23 mars 1904. — Il avait dit précédemment à Galmot que Cernuski se trouvait avec Adamowitch à l’hôtel des Étrangers. (Petit Niçois du 14 mars.)
  2. Neue freie Presse du 5 octobre 1899.