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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Ils échangèrent alors plusieurs lettres, dont celle qui avait été retrouvée, qu’Henry avait reçue la veille de sa mort, avant d’être appelé chez Cavaignac. Ainsi Henry, jusqu’à son dernier jour, le faisait venir, le traitait comme un agent.

Mercier[1] et Boisdeffre[2], qui n’avaient plus besoin qu’il fût homme d’honneur, déposèrent que Val-Carlos avait vendu pendant des années des renseignements à l’État-Major ; Rochefort[3] qu’il avait alimenté les polémiques de son journal contre Dreyfus[4]. Pourtant ces témoins, suspects eux-mêmes, le convainquirent beaucoup moins de mensonge qu’il ne le fit par ses propres explications et toute son attitude. Son gouvernement ne l’eût point mis en demeure de quitter l’armée, s’il n’avait point sali son uniforme ; et, s’il avait pu le laver, il ne serait point parti[5].

    la copie de ce rapport qui aurait été payée 1.500 francs à Mestre Amabile ou à Val-Carlos.

  1. Cour de cassation, 26 mars 1904.
  2. Ibid., 25 avril.
  3. Ibid., 23 avril : « Il venait aux bureaux de l’Intransigeant pour s’enfermer dans une pièce avec l’un de nos rédacteurs (Cloutier) et, à la suite de ces conversations, Cloutier faisait ses articles… Toute la rédaction l’a vu. » — De même Ayraud-Degeorge, journaliste à l’Intransigeant (30 avril 1904.) — Cloutier, élu député de Paris en 1902, était mort en 1903.
  4. Jolivet, rédacteur au Gaulois, dépose que Val-Carlos lui a affirmé que Dreyfus était coupable. (14 mai 1904.)
  5. Rochefort ayant publié sa déposition dans l’Intransigeant, Val-Carlos joua la comédie de porter contre lui une plainte en faux témoignage ; Rochefort répondit par une plainte en dénonciation calomnieuse. Le Parquet décida « qu’il n’y avait pas lieu de suivre », la plainte en faux témoignage n’étant pas juridique, attendu que la Chambre criminelle constituait dans la circonstance une juridiction, non de jugement, mais d’instruction, et la plainte en dénonciation calomnieuse n’étant pas davantage juridique, puisqu’elle ne s’appuyait ni sur un jugement d’acquittement ni sur une ordonnance de non-