veau. Les nations catholiques qui ne se réformeront pas seront toujours infailliblement battues par les nations protestantes. Les croyances surnaturelles sont comme un poison qui tue si on le prend à trop haute dose… La supériorité intellectuelle et militaire appartiendra désormais à la nation qui pensera librement[1]. » — On venait d’avoir la preuve que toute la partie de la nation, qui avait reçu l’éducation des moines, ne pensait pas librement ; bien plus, qu’elle exerçait sa contagion sur l’autre partie. Quel autre moyen d’empêcher le mal de s’étendre que d’en supprimer les propagateurs, c’est-à-dire les congrégations ?
Ce n’avait pas été la solution de Renan : « Ce qu’il faut désirer, disait-il, c’est une réforme libérale du catholicisme, sans intervention de l’État. » Cette réforme est-elle possible ? Il s’est toujours rencontré une minorité d’esprits catholiques très distingués pour en reconnaître la nécessité et y travailler ; ils ont été suspectés aussitôt d’hérésie, de protestantisme inconscient, condamnés, réduits à l’apostasie ou au silence.
Les Bretons ont beau passer à la libre-pensée, ils gardent des croyances de leur enfance, sinon une empreinte, du moins un souvenir ému qui résiste à toutes les considérations scientifiques ou politiques. Pour Renan, la foi, la foi catholique, sera toujours « chose exquise[2] » ; Waldeck-Rousseau n’a pas seulement le respect, « l’estime extérieure de la religion[3] », comme peut l’avoir tout esprit tolérant, mais il lui a conservé une manière de tendresse filiale qui le fait s’inquiéter pour elle des fautes commises en son nom. Voilà sa po-