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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


sées, se trouvait sous le coup d’une plainte disciplinaire devant le Tribunal de la Seine. Il était accusé de s’être fait remettre une provision, dans une expertise qui n’était pas encore commencée. Le tribunal, quelques jours après, jugea la plainte fondée, et prononça, en conséquence, la peine de la radiation[1].

Charavay était archiviste paléographe, l’un des grands marchands d’autographes de Paris ; Pelletier rédacteur au ministère des Beaux-Arts.

Le préfet montra le bordereau aux trois experts, mais ne leur en remit que des photographies. L’original resta dans son coffre, à leur disposition. Il leur recommanda le secret le plus sévère, sans leur nommer d’ailleurs l’officier accusé. Chacun devait remettre un rapport spécial.

Chaque expert reçut d’abord, avec la photographie du bordereau, des spécimens de comparaison émanant de plusieurs personnes, dont Dreyfus. Sauf celui de Dreyfus, ces spécimens, habilement choisis, ne présentaient aucune analogie, même lointaine, avec l’écriture du bordereau[2]. Les trois experts les écartèrent pour ne retenir que l’écriture soupçonnée.

Ils reçurent alors quelques corps d’écriture émanant de Dreyfus ; c’étaient des rapports ou minutes de lettres, sur papier à en-tête du ministère de la Guerre, et les diverses pièces écrites par l’accusé sous la dictée de Du Paty. Ils les emportèrent, chacun chez soi, pour les étudier à loisir.

Pelletier, tout de suite, fut suspect. « Il refusa de se servir de l’aide que lui offrait Bertillon ; les deux autres acceptèrent[3]. »

  1. 17 novembre.
  2. Rennes, II, 472, Pelletier ; II, 461, Charavay.
  3. Rennes, I, 90, Mercier.