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L’INSTRUCTION


cheville allonge également la durée de l’expertise de Bertillon. « La manière d’agir de M. Gobert ayant inspiré une certaine défiance, le ministre de la Guerre demanda au préfet de police le concours de M. Bertillon. » — Mercier était, ce jour-là, absent de Paris[1]. — « Des spécimens d’écriture et une photographie de la lettre furent alors remis à ce fonctionnaire qui put procéder à leur examen, en attendant le retour des pièces confiées à M. Gobert. » Or, Bertillon a déposé lui-même que les pièces lui furent remises « dans la matinée du 13 octobre[2] », et que son avis lui fut demandé pour la même journée.

L’État-Major s’exerçait depuis longtemps à infirmer les témoignages de Gobert et de Pelletier. Depuis que l’un et l’autre avaient refusé d’attribuer le bordereau à Dreyfus, ils étaient en butte à toute sorte de menues persécutions, vaguement dénoncés dans les journaux, suivis dans la rue, espionnés dans leur maison. Pelletier, pour ne pas s’être rendu à la première convocation de l’officier instructeur, et bien, qu’il s’en fût excusé, avait été l’objet d’une plainte au procureur général[3]. Quand il déposa le 20, D’Ormescheville lui fit un crime d’avoir été empêché le 12 ; il lui reprocha encore de ne s’être pas mis en rapport avec Bertillon qui, cependant, lui offrait communication de pelures photographiques très importantes et d’autres documents intéressants. Pour Gobert, il avait reçu, parmi les documents de comparaison, un travail de Dreyfus, qui comportait un exposé détaillé des ressources de la Banque de France. « Dreyfus ayant dû, pour faire son travail, consulter le haut personnel de la Banque, sa présence dans cet établissement

  1. Voir p. 87.
  2. Rennes, II, 321, Bertillon.
  3. Cass., II, 65, Pelletier.