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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


où Esterhazy fut dénoncé par Mathieu Dreyfus comme étant l’auteur du bordereau, Rochefort fut informé de l’existence de ces mêmes lettres par le chef du cabinet, l’homme de confiance de Boisdeffre.

Ces confidences du commandant Pauffin de Saint-Morel, Rochefort, en décembre 1897, en fera plusieurs articles. Il distingue alors deux dossiers secrets : l’un qui correspond, à peu près, au dossier connu ; l’autre qui contient les photographies de huit lettres dérobées à l’ambassade d’Allemagne, « quelques jours avant l’arrestation de Dreyfus », et restituées presque immédiatement, sur une sommation impérative de l’ambassadeur, par Dupuy. « Seulement, ces lettres avaient été photographiées. » — La Libre Parole, en décembre 1894, trois ans auparavant, avait conté exactement la même histoire ; elle précisait que « Mercier, le premier, avait tenu ces lettres en mains[1] », phrase étrange, précaution maladroite du faussaire qui les a fabriquées ; mais elle ne désignait pas autrement ces pièces terribles. — Rochefort, en décembre 1897, s’en explique plus clairement : ce sont sept lettres de Dreyfus à l’Empereur allemand, la huitième de l’Empereur au comte de Munster. Dreyfus y était nommé ; Guillaume II commentait certaines informations, et chargeait Schwarzkoppen d’indiquer au traître les autres renseignements à recueillir[2].

Cet article fut aussitôt l’objet d’un vif démenti du Gouvernement. Rochefort maintint son récit. Nouveau

  1. 8 décembre 1894, article de Gaston Méry : « Le général Mercier en possède, nous dit-on, une photographie. » Le 10, récit circonstancié de la France sur la remise de ces pièces à Munster par Dupuy. Le 11, la Libre Parole reproduit l’article de la France.
  2. Intransigeant du 13 décembre 1897, la Vérité sur le traître.