rière[1], il crie : « Vous direz demain à la France entière que je suis innocent ! » Les injures pleuvent sur lui[2] ; journalistes, officiers de réserve et de territoriale[3] poussent des huées : « Tais-toi, misérable ! Lâche ! Judas ! Sale juif[4] ! » Il se trouve un républicain pour protester ; « il est remis à sa place vertement[5] ». Dreyfus se redresse sous l’outrage : « Vous n’avez pas le droit de m’insulter ![6] » « Cabotin ! Sale juif ! » lui crie-t-on encore[7], « à Satory ! » Les officiers de réserve redoublent de fureur. Dreyfus leur dit : « Vous faites de moi un martyr[8]. »
Le jeune romancier Léon Daudet, fils d’un poète, petit-gendre d’Hugo, qui, de sa lorgnette de spectacle, a suivi le malheureux dans son supplice, le regarde maintenant de près : « Il n’a plus d’âge. Il n’a plus de nom. Il n’a plus de teint. Il est couleur traître[9]. »
Un autre écrivain cherche en vain sur ses traits « une trace de l’anéantissement moral qui doit le terrasser[10] ».
Et Dreyfus continue son chemin, la montée de son calvaire. Un instant, ses jambes fléchissent, sa démarche semble plus lourde. Mais il se redresse, et sa voix ne cesse de retentir : « Soldats ! je suis innocent ! Vive la France ! »
- ↑ Libre Parole.
- ↑ Liberté, etc.
- ↑ Petit Journal : « Les injures plus rapprochées de quelques officiers, qui ne pouvaient maîtriser leur indignation… » (Judet). « Cri noblement indiscipliné ! » (Éclair). L’Avenir militaire du 14 signale le fait et réclame une punition pour ces officiers.
- ↑ Libre Parole, Autorité.
- ↑ Libre Parole.
- ↑ Autorité, etc.
- ↑ Autorité, Liberté, etc.
- ↑ Cass., II, 136, Louis Druet.
- ↑ Figaro.
- ↑ Patrie.