Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/121

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aux choses du ciel ; l’exemption de toute ardeur, de tout souci, de tout trouble et de tout effort ; la plénitude de la vie, sans aucune agitation ; les délices du sentiment, sans le travail de la pensée ; les ravissements de l’extase, sans les apprêts de la méditation ; en un mot, la spiritualité pure, au sein du monde et parmi le tumulte des sens : ce n’est que le bonheur d’une minute, d’un instant ; mais cet instant de piété répand de la suavité sur nos mois et sur nos années.

LX.

La religion est la poésie du cœur ; elle a des enchantements utiles à nos mœurs ; elle nous donne et le bonheur et la vertu.

LXI.

La piété n’est pas une religion, quoiqu’elle soit l’âme de toutes. On n’a pas une religion, quand on a seulement de pieuses inclinations, comme on n’a pas de patrie, quand on a seulement de la philanthropie. On n’a une patrie, et l’on n’est citoyen d’un pays, que lorsqu’on se décide à observer et à défendre certaines lois, à obéir à certains magistrats, et à adopter certaines manières d’être et d’agir.