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ANNÉE 1900

raffinement de lettré, point de délicatesse. S’ils savaient comme ils me choquent souvent avec tout leur cœur ! Oui, comme ils choquent mes sentiments sincères et profonds.

Ce n’est pas la religion de la responsabilité ou de la volonté qui me rend laborieuse la conception, ou plutôt l’imagination du déterminisme, mais un si profond sentiment d’indifférence ! Vraiment les morts se taisent trop en moi. Mon atavisme ne m’a pas assez déterminée, il me laisse souvent dans l’embarras.

D’ailleurs le déterminisme doit pouvoir amener des libertés accidentelles. Les hérédités finissent par tant se croiser et s’annuler… à force d’avoir été déterminée dans tous les sens, notre volonté, venant de si loin, est peut-être plus consciente et plus avertie, plus avantageuse qu’elle ne le serait dans le libre arbitre.


Lundi 20 août.

La tristesse m’ennuie. Je me suis réveillée ce matin ne comprenant pas encore la nécessité de vivre. Cela agit sur les facultés locomotrices, la paralysie me prend au milieu d’un mouvement.

Rien n’arrive, rien ne passe. Je n’ai pas la sensation de changer de journée, je me retrouve tou-