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JOURNAL DE MARIE LENÉRU

Il n’y a de dignité sérieuse et d’indifférence à l’opinion d’autrui que dans l’absolu quant à soi. Je croirais donc avoir assez fait pour la morale sociale et avoir fait encore plus pour ma liberté intérieure en épargnant tout scandale. Sérieusement êtes-vous bien écœurée par cette manière de voir ?


8 décembre.

« Le désir de la solitude vaut mieux que la solitude » et sainte Thérèse s’y connaissait. Mme de Maintenon disait aussi : « Dans le monde tous les retours sont pour le couvent. Au couvent tous les retours sont pour le monde. »

Ne nous illusionnons pas sur nos besoins et sur nos aspirations. Nous n’en avons qu’un et qu’une : la nécessité du changement.

Quiconque peut voyager, aimer, voir et entendre, et s’appesantit chez soi, s’avilissant le regard et l’échine à faire fonction de scribe, est un manant perdu par les cuistres, à moins qu’il ne soit un gueux.

Il y a des jours où l’encre et les livres, tous ces faux semblants de la vie, me paraissent une idole plus vaine et plus odieuse, plus fausse à coup sûr que l’argent. Dans une vie réelle les livres ne peuvent être que des initiateurs.