Page:Journal de Marie Lenéru.djvu/380

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
316
JOURNAL DE MARIE LENÉRU


11 juin.

À Mme D…, — Je suis tombée dans Péguy sur une réflexion si parfaite, dans Notre Patrie, à propos de Combes : Il est aujourd’hui démontré qu’un homme peut impunément exercer un césarisme impitoyable dans la République, pourvu qu’il ne soit pas bel homme, qu’il ne soit pas militaire, qu’il porte mal même les tenues civiles, surtout qu’il ne sache pas monter à cheval.

Pour autant qu’on peut se souvenir des pièces contemporaines, il me semble que notre théâtre fourmille de coups d’État civils. On ne s’apercevait seulement pas du côté séditieux. En ce monde, il n’y a donc de vrai que le prestige, il n’y a danger que là où l’amour commence, celui des femmes, ou celui des foules — À propos de Madhi.

À Mme Dus. — J’admire de tout mon cœur, mais je ne me résigne pas, et si j’accepte pour cette guerre encore, après ce sera complètement fini. Je ne discuterai même plus. L’infirmière qui veille un grand blessé ne se demande pas si sa guérison est une utopie, s’il est plus beau que l’homme soit un martyr. Elle sait qu’elle doit le guérir et donne sa vie pour cela.

J’ai beaucoup d’espoir dans le parti socialiste. Son dernier manifeste est excellent. Ils veulent toute