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quons bien que les exemples de cette nature veulent irrésistiblement être suivis : l’effet de la protection et de la fiscalité étant d’augmenter d’une manière factice les frais de production et les prix des denrées, du moment où une nation abaisse ses tarifs et diminue son budget, elle donne à tous ses membres la faculté de produire et de vendre à meilleur marché : or, quelle est la conséquence naturelle de ce fait ? C’est que la nation ainsi dégrevée devient la maîtresse du marché, à moins que toutes les autres nations ne s’entendent pour l’en exclure ou pour progresser comme elle. Exclure du marché une nation qui produit à plus bas prix que les autres est chose impraticable et absurde, car l’intérêt du bon marché est l’intérêt général ; sous peine de ruine, il faut donc progresser, il faut renoncer à la protection et diminuer les rigueurs de la fiscalité.

Ainsi, grâce aux relations commerciales qui unissent actuellement tous les peuples, le progrès des institutions politiques et économiques est devenu irrésistible, nécessaire ; lorsqu’une nation fait un pas en avant, les autres nations, ses rivales, ne peuvent se dispenser d’en faire autant. Ce n’était donc pas une promesse vaine que celle qui était renfermée dans l’adieu plein d’espérance que M. Cobden adressait aux ligueurs en dissolvant l’anti-corn-law-league.

« Séparons-nous, disait-il, bons amis, bons frères, bons ligueurs, pour nous retrouver plus tard s’il en est besoin ! Si notre corps périt, notre esprit vivra ; il gagnera tous les peuples de la terre, car c’est un esprit de justice et de vérité[1]. »

Ce n’était pas une promesse vaine, car la liberté et la paix sont revêtues d’un tel caractère d’utilité, ce sont de si puissants véhicules de progrès, qu’il est autant impossible de les repousser quand un peuple les a mis en pratique, qu’il le serait de rejeter la machine à vapeur et la locomotive, après que l’homme a mis en œuvre dans un coin du monde ces merveilles de son génie.

G. DE MOLINARI.




CORRESPONDANCE.

Nous avons reçu, au sujet d’un article de critique publié par notre collaborateur M. S. S., une lettre de M. le colonel Colins, dans laquelle nos lecteurs trouveront une assez curieuse explication du silence de don Ramon de la Sagra, préludant souvent à l’exposition d’un nouveau système social, sans toutefois jamais laisser entrevoir la moindre parcelle de sa théorie.

M. le colonel Colins trouve que le passage de l’article dans lequel son nom intervient fourmille d’erreurs. Nous doutons que les lecteurs de sa lettre soient de son avis. MM. Colins, de Potter et de la Sagra ont bien réellement en leur possession un système social qui doit faire le bonheur de l’humanité. M. S. S. ne s’est trompé qu’en un point ; il a fait élaborer le système par les trois personnes que nous venons de citer, tandis que l’inventeur serait un prolétaire qui a désiré rester inconnu.

  1. Dernière séance de la Ligue, 2 juillet 1846.