Page:Journal des économistes, 1848, T20.djvu/69

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« Quant à l’économie politique proprement dite, l’avis unanime de la haute Commission a été que cet enseignement, convenable dans les livres, devait être éliminé d’un système d’études officiel. »

L’avis a été unanime[1] ! Nous l’aurions entendu de nos oreilles, que nous ne le croirions pas.

« Elle a estimé que l’économie politique ne se composant, jusqu’à ce jour, que de systèmes disputés, et sans aucun droit à la fixité ; il pouvait y avoir du danger à attacher de jeunes esprits à l’un de ces systèmes plutôt qu’à un autre, et que la véritable économie politique n’étant autre que la science de la politique et de l’administration, les cours proposés pour cette science et son perfectionnement devaient suffire. »

L’économie politique, qu’il définit plus ou moins bien, est une science aux yeux de M. Jean Reynaud ! Donc, il a proposé les cinq cours d’ovologie, de botanique et de technologie que vous savez pour la perfectionner.

Mais ces pauvres jeunes gens du collége de France, âgés de dix-huit à vingt-cinq ans, desquels on exigera cependant la connaissance des principales écoles modernes philosophiques, depuis Bacon et Descartes, plus la connaissance des moralistes grecs (Voy. au programme d’admission de M. Carnot), pourraient avoir l’esprit fatigué ou perverti par un professeur d’économie politique qui leur résumerait les systèmes économiques qui ont influé sur nos lois et la constitution du travail, qui leur analyserait les notions fondamentales d’économie sociale sur lesquelles se sont très-bien entendus (n’en déplaise à M. Jean Reynaud) les philosophes les plus éminents qui ont médité sur l’organisation naturelle des sociétés ; comme, disons-nous, ces pauvres jeunes gens, électeurs et éligibles, pourraient attrapper à un pareil

  1. Cette Commission était composée de MM. Jean Reynaud, président ; Beranger ; Bravais, lieutenant de vaisseau, professeur à l’École Polytechnique ; Burnouf, de l’institut, professeur an collége de France ; Cournot, du Conseil de l’Université, inspecteur général de l’ordre des sciences ; Duhamel, de l’Institut, directeur des études à l’École Polytechnique, maître des conférences à l’École normale ; Dutrey, inspecteur général de l’ordre des lettres ; Élie de Beaumont, de l’Institut, professeur au collége de France et à l’École des mines ; Geoffroy Saint-Hilaire, de l’Institut et du Conseil de l’Université, professeur au Muséum d’Histoire naturelle ; Henri Martin ; Poncelet, de l’Institut, professeur à la Faculté des sciences de Paris, colonel du génie ; Leclerc, de l’Institut et du Conseil de l’Université, doyen de la Faculté des lettres de Paris ; Lieuville, de l’Institut et du Bureau des longitudes ; Le Play, professeur à l’École des mines ; Michelet, de l’Institut, Professeur au collége de France ; Quinet, professeur au collége de France ; Reynaud, professeur à l’École Polytechnique et à l’École des ponts et chaussées ; Serres, de l’Institut, professeur au Muséum d’histoire naturelle ; Transon, répétiteur à l’École Polytechnique ; Ch. Renouvier, ancien élève de l’École Polytechnique, secrétaire.

    Il y a dans cette liste quelques beaux noms. Mais, dans tous ces membres, il n’y en a aucun qui ait pu prononcer en parfaite connaissance de cause. On peut donc dire que la décision a été prise par une véritable Commission prévôtale. Mais on ne destitue pas une science.