Page:Journal des économistes, 1849, T24.djvu/186

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Alcide Fonteyraud est né à l’Ile-de-France, d’où son père l’amena fort jeune à Paris pour achever son éducation à l’École spéciale de commerce. Cette École était alors la seule de France où l’on enseignât l’économie politique. Le jeune Fonteyraud ne tarda point à s’y faire remarquer par la netteté des ses rédactions dans toutes les questions économiques, et par une certaine hardiesse d’expression qui dénotait le penseur autant que l’écrivain. La connaissance parfaite qu’il avait de la langue anglaise lui permit bientôt d’étudier les grands économistes de l’Angleterre dans leur idiome naturel, et de rectifier les nombreuses erreurs de leurs traducteurs et de leurs commentateurs.

Son maître, celui qui écrit ces lignes, suivait avec un vif intérêt les progrès de cette belle intelligence, qui recherchait de préférence les sujets les plus graves et les plus épineux. Fonteyraud n’avait pas vingt-sept ans, et il avait approfondi les écrits d’Adam Smith, de Mill, de Malthus, de Ricardo. Il en exposait, avec une clarté parfaite,, toutes les théories, et il ramenait souvent à des termes plus simples et plus saisissants que ne l’avaient fait ces grands auteurs eux-mêmes leurs argumentations les plus délicates et les plus subtiles. C’était merveille d’entendre le jeune Fonteyraud expliquer Ricardo, comme plus tard Rossi, de regrettable mémoire, et parler de la théorie du fermage avec la liberté de Sismondi et la fermeté d’examen de J.-B. Say.

Un voyage qu’il fit en Angleterre acheva de déterminer sa vocation, en plaçant sous ses yeux les merveilles de l’industrie britannique, en même temps que les misères du paupérisme. Fonteyraud assista, pendant ce voyage, à l’un des plus curieux événements dont la Grande-Bretagne ait donné le spectacle à l’Europe. Il vit se former, sous les auspices de Cobden, la fameuse ligue des céréales qui devait ébranler le vieil édifice économique, et préparer la voie aux réformes de douane dans le monde entier. Son premier écrit fut consacré à l’exposé des efforts de l’Association et du caractère de ses plus illustres fondateurs. Fonteyraud semblait s’être inspiré au contact de ces hommes admirables, et au feu des nombreux meetings qu’ils tenaient tour à tour dans les principales villes de l’Angleterre.

Son travail, écrit avec une verve originale et une justesse d’aperçus extraordinaire, fut une véritable révélation pour la France. Dès lors Fonteyraud prit une part active à l’Association du libre-échange qui s’organisa parmi nous et qui a préparé l’affranchissement commercial de notre pays. Bientôt parut sa belle édition des œuvres complètes de Ricardo, publiée par M. Guillaumin, dans la Collection des Économistes, et précédée d’une biographie du célèbre économiste anglais. Cette biographie est un des écrits les plus remarquables qui aient honoré l’économie politique dans ces derniers temps, et elle suffirait à classer son auteur parmi les maîtres de la science. Les travaux et les idées de Ricardo y sont appréciés avec une verve de style et une fermeté de jugement bien rares dans un jeune homme. Nous ne craignons pas de dire que cette Notice est à la hauteur