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décadi afin de le faire aimer et de détruire la tradition du dimanche ; mais elles ne tardèrent pas à succomber sous l’ennui. « Le décadi mangera le dimanche », disait un orateur ; ce fut le contraire qui arriva. C’était en effet un incroyable abus d’allégories auxquelles le peuple n’entendait rien, des réminiscences de Rome et de la Grèce qui lui étaient totalement étrangères[1]. La plus grande partie des fêtes devait se passer en plein air, mais trop souvent le ciel et la température ne se montraient pas favorables. Les courses à pied et en char, les régates, les ballons, les feux d’artifices amusèrent d’abord le public par leur nouveauté, l’intéressèrent même quelque temps ; mais ces spectacles qui ne parlent qu’aux yeux sont toujours les mêmes ; en fait de grands cortèges, de costumes symboliques, de chars d’attributs, on trouve rarement quelque chose d’original. La fête de l’Être Suprême, organisée par David, fut, nous le verrons, fort belle, mais les autres n’en furent guère que la répétition et la répétition incomplète. Puis dans ces fêtes que, d’après un rapport officiel, « le sentiment embellit et dont la vertu fait le luxe et l’ornement, » il y a une autre partie, plus ennuyeuse encore : la lecture des lois et des discussions de la Convention, des discours sur la morale du citoyen, de

  1. Fouché organise à Nevers, au mois d’octobre 1793, une fête pour célébrer la valeur et les mœurs : rien n’y manque, ni le feu sacré de Vesta, ni le temple de l’Amour. Il fit inscrire sur la porte du cimetière : La mort est un sommeil éternel ; il voulait que l’on gravât sur les tombeaux la statue demi-effacée du sommeil.