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VISIONS DE L’INDE

conclusion pratique d’une personnelle philosophie. Il obéissait à une indolence native ou, mieux, à l’âme de sa race qui, après de millénaires expériences, se mit à dédaigner le travail, à repousser les plaisirs grossiers ou loyaux et à leur préférer la savoureuse privation. Souffrir, raffiner sa souffrance, voilà qui excite l’imagination des artistes et assure l’admiration des foules et des femmes.


V

L’Adoration de l’Épouse.

Attristé, je m’égare seul, après tant de spectacles honteux et sanglants ; à l’ombre d’un pipel-tree, l’arbre sacré aux feuilles légères, je distingue, sur un petit autel qui est un simple tertre, le signe masculin de Shiva reposant cette fois sur la conque féminine. C’est l’union physique fixée dans la pierre pour l’adoration… Je suis rebuté par cette religion de phallus et d’abattoir qui sut nous apparaître, de loin, si pure et si enivrante.

Un bras du Gange pénètre dans le quartier sacré ; il est limoneux et lent, eau vieille qui stagne au soleil comme une mendiante lépreuse, eau chargée d’une précieuse vase où trop de germes fermentent,