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VISIONS DE L’INDE

de la famille avec un enfant de sa caste qui est mort un an après. Tant que son père vécut, elle conserva un abri. Mais elle restait déjà frappée de réprobation ; tous ses proches la croyaient maudite et victime de grands péchés commis dans une existence antérieure. Car, dans ce pays aussi injuste que superstitieux, c’est un châtiment, une honte, et non un motif de commisération, d’être devenue veuve avant même d’être épouse !

Restée orpheline à treize ans, elle fut délaissée par la famille de son mari et par la sienne. Maigrie à la suite des jeûnes obligatoires, réduite à un éternel silence, trop misérable pour s’acquérir les prêtres par les présents nécessaires, elle avait enfin cédé aux tentations insistantes dont l’enveloppa le musulman

Un moment, devant ce désastre que je constatais véritable, j’eus l’intention de sauver cette vierge » vouée par la fatalité et la superstition à cette destinée dégradante. Mais comment ? Je ne peux me faire suivre en Europe par cette fillette, d’ailleurs attachée à ses Dieux et que la seule pensée de quitter son pays épouvante. C’est une de ces innombrables victimes des mariages d’enfants.

— « Ah ! s’écriait-elle, j’en veux à la pitié des Anglais qui ont supprimé les bûchers pour les veuves. Elles s’y jetaient volontairement, croyez-le,