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VISIONS DE L’INDE

de cuivre et d’argent ; des prêtres aux yeux vifs, aux gestes lents la surveillent.

On s’y intoxique de parfums, de précieux mirages, — plaques d’or au plafond et aux murs, bronzes dorés, mosaïques que la cornaline, l’agate, le lapis, le rubis, la turquoise, font étincelantes, — de musique aussi, — des instruments pittoresques grincent sous les doigts ou les lèvres d’un orchestre sacerdotal qui grimace en hurlant, — de chants surtout, tantôt plaintifs, tantôt ironiques, qui montent du parquet où des saints sont accroupis, du dôme et de l’étage supérieur que parcourent, fantômes recueillis, les pèlerins.

Dans ce temple superbe, d’une architecture étriquée et caressante, s’enroule et se déroule une procession misérable : les pauvres d’âme et d’espoir venus pour mendier l’aumône du Rêve, de la Mélodie et de la Couleur. Devant les portes d’argent, passent des femmes languissantes portant des plats de cuivre ; et de tout petits enfants chétifs somnolent, muets et inertes, sur les épaules maigries. Je m’attarde devant le dais central aux glands dorés, sous lequel repose le Dieu-Livre, si frileux qu’il demande la protection de tapis brodés. Tout autour, des miroirs hypnotisent ; les musiques sautillent et traînent, le serpent des pèlerins processionnants tourne en anneaux humains, multicolores, dans les galeries su-