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VISIONS DE L’INDE

Le fils n’est plus que sensibilité et faiblesse égoïste. Il est évidemment gracieux et intéressant ; mais quelle race étriquée et débile sortira de lui s’il ose fonder une famille, ce qui n’est même pas sûr ! Toutes les merveilles instructives du voyage sont pour lui enveloppées d’un voile trouble ; il ne vit pas des spectacles nouveaux, il ne se ranime qu’au courrier de France ; et sa principale préoccupation, partout où il passe, est que ses lettres le suivent.

Dès qu’il a mis le pied dans un hôtel, la première question au manager n’est pas le prix de sa chambre et des voitures, mais s’il y a un Français à la maison. Le domestique qu’il a choisi l’exploite effrontément ; peu importe, pourvu qu’il n’ait pas à faire ses malles, à payer lui-même ses notes et à prendre son ticket à la station. Voulez-vous l’éclairer sur son sort de dupe ? Aussitôt son œil se voile d’un profond chagrin. Il vous supplie de ne pas continuer, de lui rendre le service de le laisser « ne pas savoir », il tient à cette ignorance à moitié feinte. Comme il est intelligent, il se doute bien qu’il est volé, mais il préfère tout supporter plutôt que de réagir.

En somme, il n’aura rien appris dans sa pérégrination, qu’il écourte le plus possible, sinon qu’il ne peut se passer d’un abri, d’une petite patrie, d’un coin chaud. Il aura constaté cruellement sa faiblesse