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DU FONDEMENT DE L’lNDUCTION 11

qu’il naît quelquefois des monstres. Or, si nous savions seulement à priori que les mêmes phénomènes ont lieu dans les mêmes conditions, nous devrions nous borner à affirmer que le produit de chaque génération ressemblera à ses auteurs si toutes les conditions requises sont réunies ; et, lorsque nous prononçons, au contraire, en termes absolus, que le semblable engendre son semblable, nous supposons évidemment, en vertu de quelque autre principe, que toutes ces conditions sont en. effet réunies, au moins dans la plupart des cas. C’est ce second principe que M. Claude Bernard a en quelque sorte personnifié, dans la physiologie, sous le nom d’idée directrice ou organique : mais il ne paraît pas moins indispensable à la science des corps bruts qu’à celle des êtres organisés. Il n’y a pas, en effet, de loi chimique qui ne suppose, entre les phénomènes sensibles dont elle énonce le rapport, l’intervention de phénomènes insensibles, dont le mécanisme nous est entièrement inconnu ; et croire que ce mécanisme agira toujours de manière à produire les mêmes résultats, c’est admettre, dans la nature, l’existence d’un principe d’ordre, qui veille, pour ainsi dire, au maintien des espèces chimiques aussi bien qu’à celui des espèces vivantes. La conception des lois de la nature, à l’exception d’un petit nombre de lois élémentaires, semble donc fondée sur deux principes distincts : l’un en vertu duquel les