Page:Jules Vallès - L'Enfant.djvu/353

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Je ne l’appelai plus que « mère » à partir de ce jour jusqu’à sa mort.

« Ah ! tu me fais plaisir ! Merci, mon enfant ! Vois-tu ! J’aurais tant souffert de voir qu’après avoir fait toutes tes classes tu t’arrêtais avant la fin. C’est pour ton père que ça me faisait de la peine. Tu le contenteras, tu seras bachelier, et puis après… Après, tu feras ce que tu voudras… puisque tu serais malheureux de faire ce que nous voulons… »


Il a été décidé, le lendemain du jour où elle avait pleuré, que l’on ne parlerait plus de l’École normale, et que je préparerais simplement mon baccalauréat.

J’ai accepté, heureux d’essuyer avec cette promesse, et de laver avec ce sacrifice les yeux de la pauvre femme !

Elle ne me parle plus comme jadis.

Elle est si grave, et a si peur de me blesser !

« Je t’ai fait bien souffrir avec mes ridicules, n’est-ce pas ? »

Elle ajoute avec émotion :

« C’est toi qui me gronderas maintenant. Tu auras la bourse, d’abord. Ne dis pas non, j’y tiens, je le veux. Puis je suis une vieille femme, tu dois t’ennuyer d’être avec moi tout le temps. Je puis très bien rester à causer avec Madame Molay. Elle me mènera voir les belles choses aussi bien que toi. Je veux que tu aies tes soirées, au moins. Revois tes amis, tes camarades ; va chez Matoussaint. »


J’ai rejoint Matoussaint dans une chambre du