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VIE ET VOYAGES DE HIOUEN-THSANG.

et violents ; je craindrais qu’ils n’attentassent à vos jours. À cent li (dix lieues] d’ici, se trouve la source Yé-ma-thsiouen (la source des chevaux sauvages) ; vous pourrez y renouveler votre provision d’eau. »

À une petite distance de là, il entra dans le désert appelé Mo-kia-yen-tse, qui a une longueur de quatre-vingts li et que les anciens appelaient Cha-ho ou le fleuve de sables. On n’y voit ni oiseaux, ni quadrupèdes, ni eau, ni pâturages. Dans ce moment, il s’étudiait à observer, en marchant, la direction de l’ombre et lisait avec ferveur le livre appelé Kouan-chi-in-king (Avalôkitêçvara soûtra) et le Pan-jo-king (le livre de la Pradjñâ).

Dans l’origine, lorsqu’il était dans le royaume de Chou, il vit un malade tout couvert d’ulcères infects, qui n’était vêtu que de haillons sales et repoussants. Touché de compassion, il le conduisit dans son couvent et lai donna des habits et des aliments. Le malade, confus de tant de bonté, lui fit présent du livre de la Pradjñâ, que, depuis ce moment, il lisait et méditait en toute occasion. Quand il fut arrivé au milieu du fleuve de sables (du désert), il se vit précédé, suivi, entouré de figures étranges et de formes fantastiques, créées par les démons[1]. Il eut beau prier Kouan-in (Avalôkitêçvara bôdhisattva), il ne put s’en débarrasser complètement ; mais, dès qu’il eût prononcé quelques mots de ce livre, elles s’évanouirent en un clin d’œil. Dans les moments de danger, ce fut à ce livre sacré qu’il dut constamment son salut.

  1. Ici, comme à la page 23, on ne doit voir que les effets naturels du mirage sur le sol sablonneux du désert.