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CULTURE DE LA MÉMOIRE.


que des sottises, quand il n’est pas accompagné de jugement. L’entendement est la connaissance du général. L’imagination est l’application du général au particulier. La raison est la faculté d’apercevoir la liaison du général avec le particulier. Cette libre culture continue son cours à partir de l’enfance jusqu’au moment où cesse pour le jeune homme toute éducation. Quand, par exemple, un jeune homme parle d’une règle générale, on peut lui faire citer des cas tirés de l’histoire ou de la fable, où elle est déguisée, des passages de poètes où elle est exprimée, et lui donner ainsi l’occasion d’exercer son esprit, sa mémoire, etc.

La maxime tantum scimus quantum memoria tenemus 1[1] a sans doute sa vérité, et c’est pourquoi la culture de la mémoire est très-nécessaire. Les choses sont ainsi faites que l’entendement suit d’abord les impressions sensibles et que la mémoire doit les conserver. C’est ce qui arrive, par exemple, pour les langues. On peut les apprendre en suivant une méthode formelle, ou bien par la conversation, et cette dernière méthode est la meilleure en fait de langues vivantes. L’étude des vocables est certainement nécessaire, mais les enfants les apprennent bien mieux quand ils les rencontrent dans un auteur qu’on leur fait lire. Il faut que la jeunesse ait sa tâche fixe et déterminée. De même on apprend surtout la géographie au moyen d’un certain mécanisme. La mémoire aime particulièrement ce mécanisme, et dans une foule de cas il est aussi très-utile. On n’a encore trouvé jusqu’ici aucun mécanisme propre à faciliter l’étude de l’histoire ; on a bien essayé de cer-

  1. 1. « Notre science se mesure à notre mémoire. »