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PRÉFACE DE L'AUTEUR.

monde. — Encore faut-il dire, d’après ce qui précède, que la connaissance des races humaines, en tant qu’elles rentrent dans les produits variés de la nature, appartient à l’anthropologie spéculative, et pas encore à l’anthropologie pratique.

Les expressions connaissance du monde, usage du monde, n’ont pas à beaucoup près la même signification, puisque l’une n’indique que le spectacle auquel on assiste, et que l’autre fait entendre qu’on y a joué un rôle. — Mais l’anthropologiste se trouve très-mal placé pour juger ce qu’on appelle le grand monde, l’état des grands, parce qu’ils se trouvent trop rapprochés les uns des autres, et trop éloignés du reste.

Parmi les moyens propres à étendre les connaissances anthropologiques, il faut compter les voyages, ou tout au moins la lecture des voyages. Mais il convient cependant d’avoir acquis d’abord la connaissance des hommes chez soi, par la fréquentation de ses concitoyens et compatriotes[1], afin de savoir ce qu’il faut chercher à connaître à l’étranger pour étendre les idées qu’on a déjà. Si l’on ne suit pas ce plan (qui suppose déjà la connaissance des hommes),

  1. Une grande ville, capitale d’un royaume, siège du gouvernement, qui possède une université (pour la culture des sciences), et qui est en outre un point important pour le commerce maritime, qui, par des fleuves venant de l’intérieur du pays, favorise un commerce avec des nations voisines différentes de mœurs et de langage ; — Une pareille cité, comme par exemple Kœnigsberg, sur le Prégel, peut déjà passer pour une localité aussi favorable à ta connaissance de l’homme qu’à celle du monde, et où cette double connaissance peut être acquise sans se déplacer.