Page:Kant - Anthropologie.djvu/149

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plus douce : ce doit être un principe populaire, qui n’est cependant nulle part goûté du sage, par exemple en ce qui regarde le don des pressentiments, de certaines inspirations comparables au Génie de Socrate, de certaines influences qui doivent être fondées sur l’expérience, quoique inexplicables, telles que les sympathies, les antipathies, les idiosyncrasies (quolitates occultœ), don qui lui chante dans la tête comme un grillon domestique, et que personne autre ne peut entendre. — De toutes les déviations qui s’écartent le moins de la droite ligne de l’entendement sain, c’est le dada (Steckenpferd), ou la passion de s’occuper d’objets d’imagination, avec lesquels l’entendement joue par forme de passe-temps, comme avec un travail de son choix; c’est une manière de se délasser en travaillant, ou une paresse occupée. Cette disposition d’esprit, qui est une sorte de retour à l’insouciante enfance, est pour les vieillards, amis d’un repos qu’ils ont su mériter, non seulement comme une occupation favorable à la santé, et propre à tenir en haleine la force vitale, mais aussi comme une aimable et risible activité, mais si bienveillamment risible que celui qui prête à rire peut très bien prendre sa part de la gaieté commune. — Les jeunes gens et les hommes mûrs trouvent dans le dada même un délassement, et les présomptueux qui blâment d’un ton pédantesque des folies si excusables, méritent cette apostrophe de Sterne : « Laisse donc chacun, monté sur son dada, aller et venir dans les rues de la cité, pourvu que personne ne te contraigne à monter en croupe. »