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OBSTACLE A LA SENSIBILITÉ




§ XXVI.


De l’obstacle à la sensibilité, de son affaiblissement, et de sa perte totale.


La faculté de sentir peut être empêchée, ou complètement abolie. Tels sont les états d’ivresse, de sommeil, d’évanouissement, de syncope (asphyxie) et de mort réelle.

L’ivresse est l’état contre nature qui empêche de disposer ses représentations sensibles suivant les lois de l’expérience, en tant que cet état est la conséquence de l’usage immodéré d’un moyen de jouissance.

Le sommeil, suivant la définition du mot, est l’état d’impuissance où se trouve l’homme sain d’avoir conscience des représentations par les sens extérieurs. En expliquer le phénomène, c’est l’affaire des physiologistes, qui doivent rendre raison, s’ils peuvent, de ce relâchement qui ne laisse pas d’être en même temps le recouvrement des forces nécessaires pour éprouver de nouvelles sensations extérieures. L’homme, dans cet état, est comparable au nouveau-né dans le monde, et passe ainsi un bon tiers de la vie sans en avoir conscience et sans le regretter.

L’état contre nature de l’engourdissement des organes, dans lequel l’attention sur soi-même est moindre que dans l’état naturel, a quelque chose d’analogue à l’ivresse ; ce qui fait dire d’une personne qui est subi-