Page:Kant - Critique de la raison pure, I-Intro.djvu/30

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xix
DE LA RAISON PURE


précédent, autant il faut reconnaître de concepts purs de l’entendement. Kant donne à ces concepts purs, qui forment les conditions à priori de tous nos jugements, un nom qu’il emprunte à Aristote : celui de catégories.

Tableau des concepts purs ou des catégories de l’entendement, qui correspondent aux fonctions logiques du jugement.

En voici la table, qui correspond exactement à celle des jugements.

1o Quantité : unité, pluralité, totalité.

2o Qualité : réalité, négation, limitation.

3o Relation : substance et accident, cause et effet, action réciproque ou communauté.

4* Possibilité ou impossibilité, existence ou non-existence, nécessité ou contingence.

Il est curieux de voir comment l’auteur de cette table des catégories de l’entendement juge l’œuvre de son devancier Aristote.

« C’était, dit-il (p. 139), un dessein digne d’un esprit aussi pénétrant qu’Aristote, que celui de rechercher ces concepts fondamentaux. Mais, comme il ne suivait aucun principe, il les recueillit comme ils se présentaient à lui, et en rassembla d’abord dix qu’il appela catégories (prédicaments). Dans la suite, il crut en avoir trouvé encore cinq, qu’il ajouta aux précédents sous le nom de post-prédicaments. Mais sa liste n’en resta pas moins défectueuse. En outre, on y trouve quelques modes de la sensibilité pure (quando, ubi, situs, ainsi que prius, simul) et même un concept empirique {motus), qui ne devraient pas figurer dans ce registre généalogique de l’entendement ; on y trouve aussi des concepts dérivés (actio, passio) mêlés aux concepts primitifs, et d’un autre côté quelques-uns de ceux-ci manquent complètement. »

Kant, au contraire, s’est appliqué à faire sortir d’un principe commun tout le système des catégories, au lieu de les recueillir au hasard, et il a eu soin d’en écarter, non-seulement les formes pures qui appartiennent à la sensibilité, non-seulement les concepts qui viennent de l’expérience, mais même les concepts purs qui peuvent dériver des catégories, n’admettant sous ce titre que les concepts vraiment primitifs de l’esprit humain. Quant aux concepts purs dont les catégories à leur tour peuvent être la source, et que l’on pourrait appeler les prédicables de l’entendement pur, par opposition aux prédicaments qui sont les catégories, il serait aisé d’en dresser la liste, « en ajoutant, par exemple,