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ANALYSE DE LA CRITIQUE


l’espace peuvent seules conduire notre sens d’un objet à un autre. C’est ainsi que, suivant l’exemple donné par Kant (p. 273), « la lumière qui joue entre notre œil et les corps produit un commerce médiat entre nous et ces corps et en prouve par là la simultanéité. »

Les trois analogies que nous venons d’analyser ne sont autre chose que des principes servant à déterminer l’existence des phénomènes dans le temps suivant les trois modes où ils peuvent être envisagés (durée, succession, simultanéité). Sans eux l’expérience est impossible, et impossible le concept même de la nature. Nous concevons en effet, sous le nom de nature, l’enchaînement des phénomènes liés par des règles nécessaires, c’est à-dire par des lois. Or nous ne pouvons sans doute connaître les lois de la nature que par le moyen de l’expérience ; mais cette expérience elle-même serait impossible sans le concours de certains principes primitifs que nous fournit l’entendement et que nous pouvons déterminer à priori.

Seulement Kant veut que l’on remarque bien, — il insiste en terminant sur ce point, qui forme le caractère original de sa théorie, — que la preuve qu’il prétend donner de ces principes à priori ne se fonde pas sur une simple analyse des concepts des choses. On n’arriverait à rien, suivant lui, par cette voie. C’est ainsi que l’on a toujours cherché en vain une preuve du principe de la raison suffisante ; cette preuve, il faut la chercher uniquement dans la possibilité de l’expérience. Il faut montrer que l’expérience elle-même, ou la connaissance des phénomènes dans le temps, n’est possible qu’au moyen de ces principes, qu’ils en sont par conséquent les conditions nécessaires et universelles, et que c’est seulement en ce sens qu’il est vrai de dire qu’ils sont en nous à priori.

Postulats de la pensée empirique.

Les principes désignés sous le nom de catégories de l’expérience correspondent, dans la table des catégories, à la catégorie de la relation. Reste encore, pour épuiser la liste des principes synthétiques de l’entendement pur, ceux qui correspondent à la catégorie de la modalité. Kant désigne ceux-ci sous le titre de postulats de la pensée empirique en général, et il en distingue trois, qui se rapportent aux trois catégories comprises dans la modalité : le possible, le réel et le nécessaire.