Page:Kant - Critique de la raison pure, I.djvu/127

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tends par fonction l’unité de l’acte qui consiste à réunir diverses représentations sous une représentation commune. Les concepts reposent donc sur la spontanéité de la pensée, de même que les intuitions sensibles sur la réceptivité des impressions. L’entendement ne peut faire de ces concepts d’autre usage que de juger par leur moyen. Or comme, excepté l’intuition, aucune représentation ne se rapporte immédiatement à l’objet, un concept n’est jamais immédiatement rapporté à un objet, mais à quelque autre représentation de cet objet (qu’elle soit une intuition, ou déjà même un concept). Le jugement est donc la connaissance médiate d’un objet, par conséquent la représentation d’une représentation de cet objet. Dans tout jugement, il y a un concept qui en embrasse plusieurs, et qui, parmi eux, comprend aussi une représentation donnée, laquelle enfin se rapporte immédiatement à l’objet. Ainsi, dans ce jugement : tous les corps sont divisibles[ndt 1], le concept du divisible se rapporte à divers autres concepts ; mais, entre autres, il se rapporte particulièrement à celui de corps, lequel, à son tour, se rapporte à certains phénomènes qui se présentent à nous. Ainsi ces objets sont médiatement représentés par le concept de la divisibilité. Tous les jugements sont donc des fonctions qui consistent à ramener nos représentations à l’unité, en substituant à une représentation immédiate une représentation plus élevée qui comprend la première avec beaucoup d’autres et qui sert à la connaissance de l’objet, et, en réunissant ainsi beaucoup de connaissances possibles sous une seule. Comme nous pouvons ramener tous les actes de l’enten-

  1. Il y a ici dans le texte de la première et de la seconde édition, au lieu de theilbar (divisible) veränderlich (changeant) ; mais, comme le fait remarquer Rosenkranz, c’est évidemment là un erratum. J.B.