Page:Kant - Critique de la raison pure, I.djvu/63

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
63
INTRODUCTION

VI

Problème général de la raison pure.

C’est avoir déjà beaucoup gagné que de pouvoir ramener une foule de recherches sous la formule d’un unique problème. Par là, en effet, non-seulement nous facilitons notre propre travail, en le déterminant avec précision, mais il devient aisé à quiconque veut le contrôler, de juger si nous avons ou non rempli notre dessein. Or le véritable problème de la raison pure est renfermé dans cette question : Comment des jugements synthétiques à priori sont-ils possibles ?

Si la métaphysique est restée jusqu’ici dans un état d’incertitude et de contradiction, la cause en est simplement que cette question, peut-être même la différence des jugements analytiques et des jugements synthétiques, ne s’est pas présentée plus tôt aux esprits. C’est de la solution de ce problème ou de l’impossibilité démontrée de le résoudre que dépend le salut ou la ruine de la métaphysique. David Hume est de tous les philosophes celui qui s’en est le plus approché, mais il est loin de l’avoir conçu avec assez de précision et dans toute sa généralité. S’arrêtant uniquement à la proposition synthétique de la liaison de l’effet avec sa cause (principium causalitatis), il crut pouvoir conclure que ce principe est tout à fait impossible à priori. Il résulte de son raisonnement que tout ce qu’on nomme métaphysique n’est qu’une pure opinion consistant à attribuer à une vue soi-disant rationnelle ce qui, en réalité, ne nous est connu que par l’ex-