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DOCTRINE DE LA VERTU


devoirs. Ils peuvent être considérés et exister chacun séparément. Ainsi on peut aimer son prochain, quand même celui-ci mériterait peu de respect ; de même on doit respecter tout homme, quand même on le jugerait à peine digne d’amour. Mais en principe, suivant la loi, ils sont toujours unis en un devoir, de telle sorte seulement que c’est tantôt celui-ci et tantôt celui-là qui constitue le principe auquel l’autre se joint accessoirement. — Ainsi nous nous reconnaissons obligés d’être bienfaisants à l’égard d’un pauvre ; mais, comme le bien que je lui fais dépend de ma générosité, et qu’il y a là quelque chose d’humiliant pour lui, c’est un devoir d’épargner cette humiliation à celui à qui l’on donne, en présentant le bienfait soit comme une simple dette, soit comme un faible service d’amitié, et d’éviter ainsi de porter atteinte au respect qu’il a pour lui-même.


§ 24.


Quand il s’agit des lois du devoir (non des lois physiques), et que nous les considérons dans les rapports extérieurs des hommes entre eux, nous nous plaçons par la pensée dans un monde moral (intelligible), où, suivant une loi analogue à celle du monde physique, l’assemblage des êtres raisonnables (sur la terre) se fait par attraction et répulsion. Grâce au principe de l’amour mutuel[1], ils sont portés à se rapprocher continuellement, et grâce à celui du respect, qu’ils se doivent réciproquement, à se tenir à

  1. Wechselliebe.