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PÉDAGOGIE.


ter vos pieds en haut, et, afin que l’eau ne vous entre point dans la bouche, vous relevez la tête sur la nuque, et vous avez justement la position qui est nécessaire pour nager. Vous n’avez plus besoin alors que de faire agir les mains, et vous nagez. — L’essentiel est de cultiver l’habileté naturelle. Souvent une simple indication suffit ; souvent l’enfant lui-même est assez inventif, et il se forge lui-même des instruments.

Ce qu’il faut observer dans l’éducation physique, par conséquent dans celle qui concerne le corps, se rapporte soit à l’usage du mouvement volontaire, soit à celui des organes des sens. Ce qui importe dans le premier cas. c’est que l’enfant s’aide toujours lui-même. Pour cela il a besoin de force, d’habileté, de vitesse, de sûreté. Par exemple on doit pouvoir traverser des passages étroits, gravir des hauteurs escarpées, d’où l’on aperçoit l’abîme devant soi, marcher sur un plancher vacillant. Quand un homme ne peut faire cela, il n’est pas complètement ce qu’il pourrait être. Depuis que le Philanthropinon de Dessau a donné l’exemple, beaucoup d’essais de ce genre ont été faits sur les enfants dans les autres instituts. On est très-étonné quand on lit comment les Suisses s’accoutument dès leur enfance à aller sur les montagnes et jusqu’où ils poussent l’agilité, avec quelle sûreté ils traversent les passages les plus étroits et sautent par-dessus les abîmes, après avoir jugé d’un coup d’œil qu’ils ne manqueront pas de s’en bien tirer. Mais la plupart des hommes craignent une chute que leur représente leur imagination ; et cette crainte leur paralyse en quelque sorte les membres, de telle sorte qu’il y aurait en effet pour eux du danger à passer outre. Cette crainte croît ordinairement avec l’âge, et on la rencontre surtout chez les hommes qui travaillent beaucoup de la tète.

De tels essais sur des enfants ne sont réellement pas très-dangereux. Car ils ont, relativement à leurs forces, un poids beaucoup moindre, et ils ne tombent pas aussi lourdement. En outre les os ne sont pas chez eux aussi roides ni aussi fragiles qu’ils le deviennent avec l’âge. Les enfants essayent eux-mêmes leurs forces. On les voit souvent, par exemple, grimper, sans même avoir de but déterminé. La course est un mouvement salutaire et qui fortifie le corps. Sauter, lever, tirer, lancer, jeter vers un but, lutter, courir, et tous les exercices de ce genre sont excellents. La danse