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DE L’ÉDUCATION PRATIQUE.


bien dans le mal, en lui montrant, par exemple, dans les animaux de proie et dans les insectes des modèles de propreté et d’activité. Ils rappellent aux hommes méchants le respect de la loi. Les oiseaux qui poursuivent les vers sont les défenseurs des jardins, etc.

Il faut donc inculquer aux enfants quelques idées de l’Être suprême, afin que, lorsqu’ils voient les autres prier, etc., ils puissent savoir pour qui et pour quoi on agit ainsi. Mais ces idées ne doivent être que très-peu nombreuses, et, comme on l’a dit, purement négatives. Il faut commencer dès la première jeunesse à les leur inculquer, mais en même temps il faut prendre garde qu’ils n’estiment les hommes d’après la pratique de leur religion ; car, malgré la diversité des religions, il y a partout unité de religion.


Nous ajouterons, pour conclure, quelques remarques, qui sont particulièrement à l’adresse des enfants entrant dans l’adolescence. Le jeune homme commence à cette époque à faire certaines distinctions qu’il n’avait pas faites auparavant. C’est en premier lieu la différence des sexes. La nature a jeté là-dessus en quelque sorte le voile du secret, comme s’il y avait là quelque chose qui ne fût pas décent pour l’homme et qui ne fût en lui qu’un besoin de l’animal. Elle a cherché à l’unir avec toute espèce de moralité possible. Les nations sauvages elles-mêmes se conduisent en cela avec une sorte de pudeur et de retenue. La curiosité des enfants adresse parfois aux grandes personnes des questions à ce sujet : ils demandent, par exemple, d’où viennent les enfants ; mais on les satisfait aisément, ou bien en leur faisant des réponses qui ne signifient rien, ou bien en leur répondant que c’est là une question d’enfant.

Le développement de ces penchants dans l’adolescent est mécanique ; et, comme dans tous les instincts qui se développent en lui, il n’a même besoin pour cela de la connaissance d’aucun objet. Il est donc impossible de maintenir ici l’adolescent dans l’ignorance et dans l’innocence qui y est liée. Par le silence on ne fait qu’empirer le mal. C’est ce que montre bien l’éducation de nos aïeux. Dans celle de notre