Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/267

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grés de représentations, dont le principe est contenu « dans la chose complètement déterminée quant à tous ses changements présents, passés et futurs ; » et, dit-il, « cette chose est une force par la raison qui fait quelle est une substance. » Mais la Critique ne demande pas non plus autre chose que l’exposition de la notion de force (notion, soit dit en passant, toute différente de celle dont on voulait garantir la réalité, à savoir celle de substance) [1] en intuition sensible interne, et la réalité objective d’une substance, comme être sensible, se trouve assurée par là. Mais il s’agissait de savoir si cette réalité peut être démontrée de la notion de force, comme pure catégorie, c’est-à-dire encore sans application aux objets d’une intuition sensible, par conséquent comme valable également pour les êtres sursensibles, c’est-à-dire pour les purs êtres de raison : car puisque toute conscience repose sur des conditions de temps, par conséquent

  1. La proposition : la chose (la substance) est une force, au lieu de cette autre toute naturelle : la substance a une force, est une proposition qui répugne à toutes les notions ontologiques, et très préjudiciable, par ses conséquences, à la métaphysique. Car c’en est fait par là de la notion de substance, c’est-à-dire de la notion d’inhérence en un sujet, au lieu de laquelle alors on a la notion de dépendance à l’égard d’une cause : juste ce que Spinoza voulait lorsqu’il fit de la dépendance de toutes les choses du monde par rapport à leur premier être, à leur cause commune, un rapport d’inhérence, en convertissant cette force efficiente universelle même en une substance. En sorte que toutes les choses ne furent plus que des accidents de cette substance. Une substance a bien encore, indépendamment de son rapport comme sujet aux accidents (et à leur inhérence), un rapport encore à ces mêmes accidents, comme une cause à des effets ; mais le premier de ces rapports n’est pas le même que le second. La force n’est pas ce qui contient le principe de l’existence des accidents (car ce principe est contenu par la substance) : c’est la notion du simple rapport de la substance aux accidents, en tant qu’elle en contient le principe, et ce rapport est tout différent du rapport d’inhérence.