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SUR LA PHILOSOPHIE


effet, le plaisir et la peine ne précèdent pas l’appétit ; au contraire, ou ils en suivent immédiatement la détermination, ou ils ne sont peut-être pas autre chose que le sentiment de cette détermination possible de la volonté par la raison même, et par conséquent ne sont point un sentiment spécial, une susceptibilité particulière qui exige, dans un traité des facultés de l’âme, une section séparée, Mais comme, dans l’analyse des facultés de l’âme en général, se trouve incontestablement un sentiment de plaisir qui, loin de dépendre de l’appétit, peut au contraire en donner un principe de détermination, et comme il est nécessaire pour l’union de l’appétit avec les deux autres facultés en un même système, qu’il repose, comme les deux autres facultés, non pas simplement sur des principes purement empiriques, mais aussi sur des principes a priori, une critique (quoique pas une doctrine) des sentiments de plaisir et de peine, en tant que cette critique n’a pas de raisons empiriques, est donc nécessaire à l’idée de la philosophie comme système.

Or, la faculté de connaître par notions ayant ses principes a priori dans l’entendement pur (dans sa notion de la nature), et l’appétit ayant les siens dans la raison pure (dans sa notion de la liberté), il y a de plus, parmi les aptitudes de l’âme en général, une faculté ou capacité intermédiaire, à savoir, le sentiment de plaisir et de peine, qui occupe comme le milieu entre les facultés supérieures de connaître ; c’est le jugement. Quoi donc de plus naturel que de conjec-