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del arte ou à l’arrangement de vrais spectacles bien montés et prend plaisir à assister aux représentations de marionnettes de son fils Maurice. Les pages de l’Histoire de ma Vie où elle nous raconte dans quelle impatience fébrile elle était les jours où elle devait aller au théâtre, et avec quelle curiosité candide et quelle bonne foi naïve elle suivait la représentation, ces pages ne peuvent être comparées qu’aux lignes si célèbres et si chaleureuses de Bélinsky : « Aimez-vous le théâtre ? »… etc.

Le succès de la première soirée théâtrale en amena beaucoup d’autres. Au couvent, on ne parlait plus que de répétitions et de spectacles. Les derniers mois de l’hiver de 1820 se passèrent en ces occupations et ces plaisirs. L’assassinat du duc de Berry, qui attrista profondément les bonnes dévotes et les familles non moins pieuses de leurs aristocratiques pupilles, vint mettre fin à ces divertissements, au fond peu compatibles avec la vie de couvent. Mais, pour le moral et la santé d’Aurore, tout ce mouvement qui la distrayait de ses idées ascétiques, était ce qu’il y avait de plus salutaire. En même temps, ces improvisations et ces scénarios étaient, à son insu, un nouveau pas en avant dans l’évolution littéraire de la future George Sand.

Sur ces entrefaites, la grand’mère d’Aurore arriva à Paris. La nouvelle de la « conversion », de l’exaltation religieuse, de la dévotion de sa petite fille était parvenue jusqu’à elle. Toutefois, tant que cette exaltation s’était manifestée impétueuse, passionnée, presque tragique, l’aïeule ne s’en était pas inquiétée, comptant, avec raison, que cette tension d’esprit ne se maintiendrait pas et que tout cela passerait. Mais quand elle vit que sa petite-fille était gaie, riait, voyait le monde les jours de congé où elle pouvait sortir avec sa grand’mère, mais qu’au fond tout lui