Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T1.djvu/313

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jeune femme devait tâcher de disparaître de la chambre sans être aperçue, et allait se cacher dans l’ancien petit boudoir de sa grand’mère qui n’avait qu’une porte et, sous aucun prétexte que ce fût, n’était un passage pour personne. Elle s’y trouvait tout près de ses enfants, qu’elle entendait respirer. « Là, je savais bien m’occuper et me distraire du vacarme extérieur qui durait souvent jusqu’à six ou sept heures du matin. Je m’étais habituée à travailler la nuit auprès de ma grand’mère malade ; maintenant, j’avais d’autres malades, non à soigner, mais à entendre divaguer. »

Cette ivrognerie entraîna plus tard d’autres suites, encore plus mauvaises. Casimir commença, dans le sens le plus grossier du mot et de la manière la plus ordurière, à trahir sa femme, sans même se donner la peine de le lui cacher. Ainsi, Aurore apprit d’abord sa liaison à Bordeaux avec une personne innommable, qui était alors la maîtresse de Desgranges[1]. Après cela, Casimir ne se gêna plus, ni à La Châtre, ni à Nohant. Ses liaisons avec deux femmes de chambre, — l’espagnole Pépita, ancienne bonne de Solange, et la berrichonne Claire — étaient sues, non seulement dans toute la ville et dans tout Nohant, mais aussi d’Hippolyte et des amis d’Aurore. Tout le monde regardait cela avec calme, comme quelque chose de très simple et d’amusant, et l’on se moquait très plaisamment de Dudevant. Et même, quand une de ces filles se mit à poursuivre Casimir, en exigeant qu’il assurât des ressources à son enfant[2], on continua à rire de Dudevant, sans se soucier le moins

  1. Il en est question dans la lettre citée plus haut, adressée à M. Accolas. Le passage n’est pas de nature à pouvoir être cité décemment.
  2. L’enquête judiciaire établit ces faits sur les dépositions de nombreux témoins.