Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T1.djvu/388

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mariage, la soumission de la femme à son mari ? Vaudrait-il mieux par hasard mentir et continuer à vivre avec un homme non aimé, indigne, que d’unir honnêtement et librement sa vie à l’homme aimé ? Aujourd’hui que ces questions et leurs solutions sont des vieilleries par trop rebattues par les « féministes » il serait absurde d’en parler. Il y a plus encore : il en fourmille de ces « femmes incomprises » et on a vraiment trop abusé dans la littérature et dans la vie de la prétendue « liberté sacrée » de l’amour, on s’en est trop servi pour déguiser des caprices et des fredaines. Rompre des lances pour défendre le droit au bonheur de la pauvre Indiana, d’autant plus qu’elle n’a pas trouvé le bonheur dans l’homme de son choix, serait certes parfaitement ridicule aujourd’hui, puisque, par là, son « crime » contre la morale sociale eut son « châtiment ». Mais si ces questions ont été discutées, résolues et reléguées aux archives, c’est peut-être parce qu’il y eut une George Sand, qui les a soulevées à temps et qu’une des premières elle a lutté contre la position humiliée et opprimée de la femme dans le mariage. Et Indiana, quoi qu’en ait dit George Sand dans ses « préfaces », mérite d’arrêter aujourd’hui notre attention comme une première tentative de révolte. Ce roman est d’ailleurs écrit avec tant de passion, avec tant d’ardeur artistique et un style si merveilleux que, même au point de vue de l’art, il demeure de nos jours encore, une œuvre vraiment remarquable.

On a souvent dit qu’en créant la pauvre Indiana. — cette créole rêveuse et passionnée, mariée au colonel Delmare, dépérissant auprès de ce mari rude et prosaïque, brûlant d’amour pour Raymon de Ramière, un élégant correct et sans cœur, docile et servile devant les lois mondaines, d’abord épris d’Indiana et l’entraînant dans sa passion, puis