Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/126

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qui nous serait trop facile, et qui aurait l’inconvénient d’atteindre, dans la personne des vivants, le nom porté par un mort illustre, nous essayerons de trancher à notre point de vue une question qui a été soulevée à propos de cet incident, et qui peut être discutée sans amertume… »

Après avoir analysé les opinions opposées, mais également répandues, — l’une exigeant que l’auteur ne dépeigne que ce qu’il a vécu lui-même, et l’autre au contraire n’admettant que des sujets inventés, — George Sand pose la question suivante : « Faut-il être artiste pour soi tout seul dans la vie murée, ou faut-il l’être au profit des autres, en rase campagne, en dépit des amertumes de la célébrité ?… »

Elle répond à cette question affirmativement et tout en signalant les péripéties qui accompagnent toujours la carrière d’un écrivain qui désirerait transmettre aux autres non seulement son art, mais aussi son expérience psychologique, elle continue : « On peut même être femme et ne pas se sentir atteinte par les divagations de l’ivresse ou les hallucinations de la fièvre, encore moins par les accusations de perversité qui viennent à l’esprit de certaines gens habitués à trop vivre avec eux-mêmes… » L’artiste, selon George Sand, peut et doit profiter de ce qu’il a personnellement vécu ; son goût artistique et le respect des autres doivent le guider : le goût et le respect des autres, doivent également guider la critique dans l’analyse qu’elle fait des œuvres d’art. Si la critique s’abaisse jusqu’au métier d’agent de police pour savoir de qui l’on a fait le portrait, elle est brutale, inconvenante ; lorsqu’elle dévoile ce que le public n’aurait jamais appris sans elle, elle est maladroite ; ceux qui livrent au public des révélations qui ne lui étaient pas destinées, lui rendent un mau-