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femme de chambre qui lui apportait les repas et les lettres, savaient où elle passait ses journées et lui en gardaient le secret. Les araignées, les souris et les merles, les chardons et les orties envahissaient son refuge ; mais c’était cet abandon même qui charmait le poète. Souvent aussi elle descendait le soir au jardin pour s’y promener en liberté par les petits sentiers couverts d’herbe, ou s’adonner à la rêverie, assise sur les marches brisées du perron. C’est ce jardin qu’elle a fait décrire plus tard, dans Isidora, par le héros de son œuvre, Jean Laurent. À la fin du mois de juin, elle fit un court séjour à Nohant. Convaincue une fois de plus que la vie sous le même toit que Dudevant était pour elle chose impossible, elle alla au commencement de juillet à Bourges où l’attirait le désir de se rapprocher de Michel et où elle s’installa encore dans une maison déserte, qu’une de ses amies avait mise à sa disposition. Voici les dates que nous trouvons sur la feuille volante déjà citée plus haut :

« Revenue ici (à Nohant) le 21 ou 22 juin. Michel ici le 24. Je le conduis à Bourges. Je pars au commencement de juillet ; je vais à Bourges par Châteauroux. Lamennais[1]. À Paris fin de juillet. À Nohant le 6 août, Michel vient le 8, je le conduis à Châteauroux. Je reviens à Nohant jusqu’au 1er septembre. Tout septembre, à Paris. Revenue ici le 30… »

C’est dans la petite maison déserte, à Bourges, dans une solitude complète, — les repas lui étaient apportés du dehors, — qu’elle passait le temps à étudier la phrénologie d’après Lavater, Gall et Spurzheim. C’est là qu’elle écrivit la septième Lettre d’un voyageur « sur Lavater et une maison déserte », dédiée à Liszt, lettre à laquelle celui-ci répondit

  1. Lamennais l’invitait à venir faire un séjour à la Chenaie, mais elle n’y est pas allée. (Voir Histoire de ma Vie, t. IV, p. 375-376.)