Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/332

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à quitter le domicile conjugal en l’abreuvant de dégoûts ? Vous n’êtes pas seulement l’auteur des causes de cette absence, vous en êtes l’instigateur et le complice. N’avez-vous pas livré votre femme, jeune et sans expérience, à elle-même ? Ne l’avez-vous pas abandonnée ? Vous ne pouvez plus dire aux magistrats : « Remettez dans mes mains les rênes du coursier », quand vous-même les avez lâchées. Pour gouverner une femme il faut une certaine puissance d’intelligence, et qui êtes-vous, que prétendez-vous être, à côté de celle que vous avez méconnue ? Quand une femme est près de succomber, il faut être capable de la relever ; quand elle est faible, il faut la soutenir, être capable de lui donner un bon exemple ; et quel exemple pouvez-vous lui donner ? Pouvez-vous réclamer une femme que vous avez délaissée pendant huit ans ? Était-elle coupable, celle qui épanchait sa belle âme tout entière dans cette lettre que vous-même venez de livrer à la publicité des débats ? Ils étaient donc bien faibles ses torts, puisque vous êtes réduit à les chercher dans cette lettre qui la justifie ! »… (Michel relit encore un fragment de la lettre que le public écoute avec un murmure approbateur.) « Depuis, vous avez reçu votre femme, vous lui avez écrit, vous avez vécu intimement avec l’ami honnête et pur qui sut la respecter, vous lui avez serré la main. Pourquoi avez-vous délaissé une épouse qui ne méritait aucun reproche ? pourquoi l’avez-vous forcée à s’éloigner de vous ? »

Michel évoqua ensuite l’affaire de Mirabeau, qui aimait tant sa femme qu’ayant intenté un procès contre elle, il s’était réconcilié avec elle au tribunal se désistant de sa plainte. Puis, après avoir encore une fois désapprouvé l’indigne répétition qu’on faisait de l’accusation portée contre Marie-Antoinette, Michel réfuta victorieusement l’accusation