Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/65

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À Gènes, les deux voyageurs se mirent, sans se lasser, à visiter les palais et les musées, admirant en vrais artistes toutes les merveilles d’art disséminées avec tant de profusion dans cette charmante ville. De Gènes ils se rendirent à Florence par Livourne.

À Florence commencèrent à s’élever entre eux les premières discordes, d’abord passagères, mais elles prirent bientôt un caractère menaçant et démontrèrent aux deux amoureux, si heureux naguère, qu’ils étaient deux individualités différentes, ce qui est le symptôme le plus vrai et le plus fatal d’une rupture menaçante et… du commencement de la fin. Ils étaient cependant encore parfaitement heureux, mais il y avait déjà des nuages à l’horizon, et les biographes de Musset (les deux meilleurs, du moins : Arvède Barine et Lindau) sont obligés de reconnaître que la cause de ces premiers malentendus était due à Musset lui-même. C’est ici qu’il faut rapporter la page de la Confession que cite Mme  Barine, en parlant de la course à Fontainebleau. Un passé trop orageux avait laissé en Musset des traces ineffaçables ; il avait éprouvé par lui-même ce qu’il avait déjà si souvent pris pour sujet de ses poèmes et de ses drames comme par exemple de : la Coupe et les lèvres. La vie de débauche qu’il avait auparavant menée le rendait incapable d’un amour candide, confiant, plein d’estime et d’amitié ; elle avait empoisonné à jamais dans son âme la source du pur dévouement et de la foi, et l’avait souillée. Vainement essayait-il d’oublier le passé, de croire à une femme fidèle, de l’aimer avec respect, « saintement ». Des souvenirs affreux, hideux, d’amères expériences ne lui faisaient voir en elle que la source de grossières jouissances et de tromperies plus grossières encore. Et la fantaisie sans frein, cette