Page:Kempis - L Imitation de Jesus Christ, traduction Lammenais, edition Pages, 1890.djvu/146

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voue indigne de le posséder, et la privation, qui le purifie, en flamme encore son ardeur. O Jésus, qu’elles sont merveilleuses les voies par où vous conduisez les âmes qui vous aiment, qui ont soif de vous ![1] Tantôt vous les inondez de votre joie, tantôt vous les délaissez dans les larmes : maintenant vous les prévenez, et puis elles semblent vous appeler en vain, comme l’épouse du divin Cantique. Épreuves de tendresse et de miséricorde ! Ainsi épurées, ces âmes élues peu à peu se dégagent de leurs liens ; elles s’élancent vers vous, et un dernier effort d’amour les porte au pied du trône où vous vous montrez sans voile. Alors la jouissance, alors l’allégresse et l’éternel rassasiement : Satiabor cum apparuerit ![2]

CHAPITRE VII.

QU’IL FAUT CACHER HUMBLEMENT LES GRACES QUE DIEU NOUS FAIT.

1. J.-C. Mon fils, lorsque la grâce vous inspire des mouvements de piété, il est meilleur pour vous et plus sûr de tenir cette grâce cachée, de ne vous en point élever, d’en parler peu, et de ne pas vous exagérer sa grandeur ; mais plutôt de vous mépriser vous-même, et de craindre une faveur dont vous étiez indigne.

Il ne faut pas s’attacher trop à un sentiment qui bientôt. peut se changer en un sentiment contraire.

Quand la grâce vous est donnée, songez combien vous êtes pauvre et misérable sans la grâce.

Le progrès de la vie spirituelle ne consiste pas seulement à jouir des consolations de la grâce, mais à en supporter la privation avec humilité, avec abnégation, avec patience ; de sorte qu’alors on ne se relâche point dans l’exercice de la prière, et qu’on n’abandonne aucune de ses pratiques accoutumées.

Faites au contraire : tout ce qui est en vous. le mieux que vous pourrez, selon vos lumières ; et ne vous négligez

  1. Ps. xli, 3.
  2. Ps. xvi, 15.