Page:Kempis - L Imitation de Jesus Christ, traduction Lammenais, edition Pages, 1890.djvu/232

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crainte des hommes, et moins ému de leurs paroles malignes.

Qui peut prévoir, qui peut détourner tous les maux à venir ? Si ceux qu’on a prévus, souvent blessent encore, que sera-ce donc de ceux qui nous frappent inopinément ?

Pourquoi, malheureux que je suis, n’ai-je pas pris de plus sûres précautions pour moi-même ? Pourquoi aussi ai-je eu tant de crédulité pour les autres !

Mais nous sommes des hommes, et rien autre chose que des hommes fragiles, quoique plusieurs nous croient et nous appellent des anges.

A qui croirai-je, Seigneur ! à qui, si ce n’est à vous ? Vous êtes la vérité qui ne trompe point, et qu’on ne peut tromper.

Au contraire, tout homme est menteur[1], faible, inconstant, fragile, surtout dans ses paroles ; de sorte qu’on doit à peine croire d’abord ce qui paraît le plus vrai dans ce qu’il dit.

4. Que vous nous avez sagement avertis de nous défier des hommes ; que l’homme a pour ennemis ceux de sa propre maison[2] ; et que si quelqu’un dit : Le Christ est ici ou : il est là[3], il ne faut pas le croire !

Une dure expérience m’a éclairé : heureux si elle sert à me rendre moins insensé et plus vigilant !

Soyez discret, me dit quelqu’un, soyez discret ; ce que je vous dis n’est que pour vous. Et pendant que je me tais et que je crois la chose secrète, il ne peut lui-même garder le silence qu’il m’a demandé ; mais, dans l’instant il me trahit, se trahit lui-même et s’en va.

Éloignez de moi, Seigneur, ces confidences trompeuses ; ne permettez pas que je tombe entre les mains de ces hommes indiscrets, ou que je leur ressemble.

Mettez dans ma bouche des paroles invariables et vraies ; et que ma langue soit étrangère à tout artifice.

  1. Ps. cxv, 11.
  2. Mich. vii, 2.
  3. Matth. xxiv, 23.