Page:Kempis - L Imitation de Jesus Christ, traduction Lammenais, edition Pages, 1890.djvu/258

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

4. La nature travaille pour son intérêt propre, et calcule le gain qu’elle peut retirer des autres.

La grâce ne considère point ce qui lui est avantageux, mais ce qui peut être utile à plusieurs.

5. La nature aime à recevoir les respects et les honneurs.

La grâce renvoie fidèlement à Dieu tout honneur et toute gloire.

6. La nature craint la confusion et le mépris.

La grâce se réjouit de souffrir des outrages pour le nom de Jésus[1].

7. La nature aime l’oisiveté et le repos du corps.

La grâce ne peut être oisive, et se fait une joie du travail.

8. La nature recherche les choses curieuses et belles, et repousse avec horreur ce qui est vil et grossier.

La grâce se complaît dans les choses simples et humbles ; elle ne dédaigne point ce qu’il y a de plus rude, et ne refuse point de se vêtir de haillons.

9. La nature convoite les biens du temps, elle se réjouit d’un gain terrestre, s’afflige d’une perte, et s’irrite d’une légère injure.

La grâce n’aspire qu’aux biens éternels, et ne s’attache point à ceux du temps ; elle ne se trouble d’aucune perte, et ne s’offense point des paroles les plus dures, parce qu’elle a mis son trésor et sa joie dans le ciel, où rien ne périt.

10. La nature est avide, et reçoit plus volontiers qu’elle ne donne : elle aime ce qui lui est propre et particulier.

La grâce est généreuse et ne se réserve rien ; elle évite la singularité, se contente de peu, et croit qu’il est plus heureux de donner que de recevoir[2].

11. La nature, se porte vers les créatures, la chair, les vanités ; elle est bien aise de se produire.

La grâce élève à Dieu, excite à la vertu, renonce aux créatures, fuit le monde, hait les désirs de la chair, ne se

  1. Act. v, 41.
  2. Act. xx, 35.